Publié le 15/04/2020 à 07h26
Découvrez notre rubrique « Point Par Point » qui retrace la vie de nos joueurs. C'est au tour de Yannick Cahuzac de se prêter au jeu !
« Je suis né à Ajaccio et j’y ai grandi jusqu’à mes 14-15 ans. Ensuite je suis allé en centre de formation à Bastia. J’ai évolué sous les couleurs du SC Bastia jusqu’à mes 32 ans avant de rejoindre Toulouse pendant 2 ans. »
« Il n’y avait pas de téléphone portable donc on avait d’autres occupations. Avec mes amis, on se donnait rendez-vous après les entraînements ou après l’école sur la place à côté de chez moi pour jouer au foot. C’était vraiment notre moment à nous. On faisait aussi beaucoup de vélo dans le quartier. On était une belle bande de copains. On a passé de bons moments ensemble. On est d’ailleurs resté en contact.
Comme je suis parti très tôt de la maison, je n’ai pas eu de rapport conflictuel avec mes parents. On dit souvent qu’à l’adolescence c’est toujours compliqué. Le centre de formation m’a beaucoup apporté en tant que joueur de foot et m’a aussi beaucoup aidé à devenir un homme. »
Avec sa maman
« Mon père travaille dans une banque et ma mère est infirmière libérale. Je suis très fusionnel avec mes parents. C’est peut-être parce que je suis fils unique. Ils ont toujours été là pour moi. Je n’ai jamais manqué de rien. »
« Je n’aimais pas trop l’école mais c’était important pour mes parents, plus que le football d’ailleurs. Si je n’avais pas eu mon bac, je ne pense pas que j’aurais pu continuer dans le foot. C’était vraiment une priorité pour eux car dans le football on n’est pas sûr d’y arriver. Ils étaient très rigoureux à ce propos. Finalement, j’ai eu mon bac au rattrapage ! »
« Je suis très proche de mon cousin germain Jean-Claude qui a un an et demi de plus que moi. Je le considère comme mon frère. Petit, c’était un peu mon exemple. J’ai voulu faire comme lui qui était fou de foot. Il m’a transmis cette passion.
J’étais très jeune lorsque j’ai tapé pour la première fois dans un ballon, c’était avec mon cousin. Et mon premier entraînement de football en club, c’était au GFC Ajaccio, toujours aux côtés de Jean-Claude.
Je ne me souviens plus vraiment comment j’ai intégré le centre de formation du SC Bastia. J’ai surement dû être repéré lors de matchs. Par contre, je me souviens très bien de la première fois où j’ai dû aller passer un essai. De chez moi à Bastia, il y avait 2 heures de route. Comme il y a beaucoup de lacets en Corse, j’ai vomi durant tout le trajet [Ndlr, rires]. J’étais affreux le jour de la détection ! Je ne pense pas qu’ils m’aient recruté par rapport à ce premier essai.
C’était vraiment quelque chose de grand pour moi d’intégrer le centre de formation de Bastia. A l’époque, c’était le seul en Corse. C’était une belle récompense et une grande fierté ! Je me sentais privilégié de pouvoir l’intégrer.
Certains joueurs avaient de gros contrats pour notre jeune âge mais cela ne m’a jamais interpellé. Je me sentais chanceux de pouvoir suivre une bonne scolarité et de m’entraîner dans de bonnes structures et un super club.
Ce n’est que bien plus tard, quand je suis arrivé en équipe réserve et que je n’étais pas loin du monde professionnel, que j’ai eu envie de gravir les échelons. J’étais un compétiteur et j’avais envie de devenir footballeur pro, d’aller au bout ! »
« En Corse, le nom « Cahuzac » est connu dans le milieu du football. Mon grand-père, Pierre, était un grand joueur. Il a évolué au GFC Ajaccio, à Toulouse, en Equipe de France. Il était un grand entraîneur au GFCA et au SC Bastia. Il a emmené le club bastiais en Coupe d’Europe. Il a aussi été 4 ou 5 fois Champion de France. C’est quelqu’un qui a marqué l’histoire du football corse.
Mon oncle était aussi footballeur professionnel. Il jouait en Ligue 2. »
« Je ne comptais pas partir de Bastia. On avait été rétrogradé de Ligue 1 en Ligue 2. Mais le club a connu des problèmes économiques et est descendu de 5 divisions ! J’ai donc pris la décision de partir. Ça a été un déchirement car à 32 ans je me voyais terminer dans mon club corse. Je suis ensuite parti à Toulouse et ça a vraiment été un privilège. Professionnellement, ça s’est bien passé et humainement, ça a été une aventure incroyable ! Avec ma femme et mes enfants, c’était la première fois que l’on partait loin, dans une grande ville. J’en garde de bons souvenirs. »
« J’ai participé à de nombreux matchs en sélection corse. C’est une fierté pour moi de pouvoir jouer sous cet écusson. A l’origine, c’est André Di Scala qui a créé l’équipe corse. Ça met en avant la Corse qui est une terre de football.
On ne peut pas faire de compétitions officielles car on n’est pas reconnu en tant que sélection nationale. On a disputé de nombreux matchs et tournois amicaux face à la Bulgarie, le Nigéria, le Togo, le Gabon, le Burkina Faso, une sélection composée par Gérard Houllier avec Mamadou Sakho, Jérôme Rothen… On est aussi parti en Guadeloupe où l’on a fait un tournoi avec la Martinique.
L’an dernier on a joué en Sardaigne. Il y avait des joueurs peu connus et d’autres plus renommés comme Rémy Cabella, Nicolas Penneteau, Toto Squillaci, François Modesto… »
Avec son papa
« C’est un événement qui a énormément marqué la Corse. Ça a été le plus grand drame de l’histoire du football en France. Mes souvenirs restent vagues puisque c’est arrivé le 5 mai 1992, j’avais 7 ans et j’étais à Ajaccio. En grandissant, j’ai vu des images. J’en ai beaucoup entendu parler lorsque j’étais à Bastia et ma belle-famille a été touchée par ce drame. C’était bouleversant. »
« Après Toulouse, j’ai eu l’opportunité de pouvoir signer dans ce grand club qu’est le RC Lens, avec sa grande histoire et la ferveur que l’on lui connait. Pour une fin de carrière, je suis un privilégié de pouvoir évoluer dans ce genre de club. »
« Jean-Louis Leca a effectivement joué un rôle lorsque je suis arrivé à Lens mais au même titre que les joueurs que je connaissais déjà comme Steven Fortes, El Hadji Ba, Guillaume Gillet, Thomas Vincensini, Walid Mesloub… ça a été plus facile de m’intégrer à Lens qu’à Toulouse où il y avait beaucoup de jeunes que je connaissais peu. Au Racing, on a un super groupe et de supers mecs ! Je pense avoir une excellente relation avec tous les joueurs. C’est un pur plaisir de venir travailler tous les jours aux côtés de ces personnes. Je suis souvent avec Jean-Louis et Thomas car on habite à côté et nos familles s’entendent bien. »
« Lorsque je le peux, j’essaye de conseiller les jeunes de l’équipe qui ont de la qualité. Ils m’apportent aussi beaucoup. Ce sont de bons joueurs mais aussi de bons mecs. Ça donne vraiment envie de les aider pour qu’ils aillent le plus loin possible. Ils le méritent. »
« Mes parents ont toujours été là pour moi. Je viens d’un milieu assez modeste et ils se sont toujours « saignés » au travail pour que je ne manque de rien. Ils ne m’ont jamais poussé à outrance dans le football comme peuvent le faire certains parents. Ils m’ont donné une bonne éducation avec de grandes valeurs.
Dans le foot, j’ai rencontré de belles personnes qui m’ont aidé, comme Florent Laville qui était un grand joueur lyonnais venu à Bastia en fin de carrière. Ça a été une belle rencontre alors que je débutais la mienne. C’était quelqu’un, avec un nom. Malgré cela, il était simple. Il nous invitait chez lui. Il était toujours de bons conseils alors que je n’étais qu’un petit jeune de 19 ans. Il m’avait pris sous son aile. Je me souviens qu’il m’avait appelé avant mon premier match en pro et m’avait donné des conseils.
Il y a aussi Toto Squillaci qui est, au-delà du grand joueur, un grand monsieur. Je me suis fait des amis pour la vie grâce au football comme Jean-Louis Leca, Gilles Cioni, Hervé Sekli. Ce sont des personnes importantes dans ma vie ! »
Avec sa maman
« J’aime la discrétion. Moins on parle de moi, mieux je me porte. J’aime bien faire ma vie tranquillement avec ma famille et mes amis. Je ne suis pas quelqu’un d’excentrique. Je suis tranquille, un peu à l’opposé du terrain. C’est vrai que les gens connaissent « Yannick Cahuzac le joueur » et ils peuvent être surpris par l’image que je peux renvoyer en dehors. J’ai une double facette. Bon en même temps, si on écoute ma femme, j’ai mon petit caractère quand même ! [Ndlr, rires] »
« Il n’y a pas de fumée sans feu. A un moment donné, quand on prend autant de cartons, on ne peut pas se trouver d’excuses. Après je pense qu’il y a aussi cette image qui me colle à la peau, cette réputation et celle de Bastia qui font que j’ai pris certains cartons immérités. Ce n’est pas quelque chose dont je suis fier. Je ne me la raconte pas en disant que j’ai pris x cartons. Cela fait partie de ma carrière. J’ai tellement envie de réussir que parfois j’ai du mal à me contrôler et j’essaye de régler des problèmes qui ne me concernent pas. Je peux aussi être submergé par mes émotions. Et puis j’ai aussi un jeu engagé. Je pense que c’est un tout.
J’ai fait beaucoup de progrès depuis quelques années.
Inconsciemment, je pense que certains arbitres veulent m’avertir pour me calmer. Et puis c’est plus « facile » de réprimander un Cahuzac qui comptabilise pas mal de cartons qu’un jeune joueur. Honnêtement, j’ai d’excellentes relations avec beaucoup d’arbitres. »
« J’ai rencontré ma femme Marie-Caroline très jeune, à l’âge de 17-18 ans. On est marié depuis 2012 et c’est une personne qui compte énormément pour moi !
On s’est rencontré à Ajaccio. Je l’ai abordé à plusieurs reprises mais en vain… Je pensais qu’il y avait un petit quelque chose entre nous mais elle ne m’a pas du tout remarqué au début [Ndlr, rires]. Puis petit à petit, et aussi grâce à nos amis en commun, on s’est mis ensemble.
Marie-Caroline m’apporte beaucoup au quotidien. Je ne suis pas quelqu’un de facile à vivre et elle arrive à me canaliser. Elle a aussi été très importante dans ma carrière. Elle est là depuis le début. Même bien avant ! J’ai traversé des périodes difficiles à cause de mes blessures et elle a toujours été présente.
On a un garçon de 9 ans Baptiste et une fille de 6 ans Milia. Je suis très proche d’eux. Je suis un papa poule, très câlin mais mes enfants me craignent aussi car je sais élever la voix quand il le faut. »
Avec sa femme Marie-Caroline et leurs enfants Baptiste et Milia
« Je suis très casanier et famille. Je sors peu mais j’aime bien visiter. L’histoire des régions et des cultures m’intéresse beaucoup. J’ai d’ailleurs récupéré plein de prospectus sur les Hauts-de-France. Il y a pas mal de choses à faire dans le coin !
J’aime aussi la nature, me balader avec mes proches, faire du bateau et de la chasse sous-marine. En Corse, je vais souvent pêcher, ramasser des champignons, me promener en montagne avec mon chien. Je suis bien servi avec la Corse ! Il y a vraiment de beaux paysages et les gens sont chaleureux.
Les valeurs corses sont ancrées en moi. Je m’y identifie beaucoup ! Je suis très attaché à mon île que je n’ai jamais quittée jusqu’à mes 32 ans. Après, je pense que c’est important de voir ce qui se passe ailleurs, de voir autre chose. Pour s’ouvrir c’est bien. Mais j’ai souvent ce besoin de rentrer pour me ressourcer auprès de ma famille et mes amis. »
« Je ne suis pas vraiment fan des réseaux sociaux. J’ai créé mes comptes pour « éviter » les usurpations d’identité. Même si ça n’empêche pas des gens de le faire. Certains se sont fait passer pour moi et critiquaient mes équipiers. Une fois, quelqu’un s’en est pris à Neymar en tweetant « Neymar je te donne rendez-vous le 19 août, n’oublie pas tes protège-tibias. ». Comme j’ai cette image de joueur rude et que c’était Neymar, il a fait le buzz. Mais ce n’était pas moi ! »
« On reste toujours dans le thème de la nature. J’aurais aimé être garde forestier pour protéger notre bel environnement.
Je commence à penser de plus en plus à mon après-carrière puisque j’approche de la fin et j’aimerais rester dans le football. Mais dans tous les cas, je retournerai en Corse pour retrouver ma famille, mes amis, mes racines, ma terre. »