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Du haut de ses 19 ans, Jean-Ricner a rythmé son entretien "Entre les Lignes" par ses blagues et sa bonne humeur. Ce nouveau volet nous plonge dans sa jeune vie d’homme et de footballeur…Récit

Récit

C’est le 27 juin 1998 à Colombes qu’est né Jean-Ricner. Le benjamin de la famille n’a pas échappé à la tradition. Tout comme ses deux grands frères Wisnel et Dieunor, “Jean-Jean“ comme on aime l’appeler a lui aussi hérité d’un prénom peu commun. Mais ne lui demandez pas d’où ça vient, il n’en a aucune idée.

Le petit dernier était le chouchou de la famille. Son père électricien et sa mère femme de ménage ne lui disaient jamais non. « Quand mes frères voulaient quelque chose et qu’ils savaient qu’ils ne l’auraient pas, ils passaient par moi. J’avais tout ce que je voulais. » en rit-il. Le petit protégé s’entendait très bien avec ses frères. « Ils ont toujours été gentils avec moi. On faisait tout ensemble. »

Jean-Ricner, au centre, avec ses frères Dieunor et Wisnel

Après sa naissance, la famille de Jean-Ricner a déménagé à Villetaneuse, dans la cité Allende où ils habitent toujours. « Là-bas c’était le trafic, les vols… J’aurais pu être engrainé là-dedans quand j’étais petit. L’effet de groupe, ça va vite… Heureusement mes frères étaient là pour me surveiller et m’ont toujours montré le droit chemin. Plusieurs potes n’ont pas eu cette chance. Ils ont choisi autre chose que le football. En voyant ça, tu te dis que c’est du gâchis parce qu’ils avaient du talent, certains beaucoup plus que moi. »

Faire le bon choix

Pour l’éloigner des vices de la cité, les deux grands frères emmenaient “Jean-Jean“ partout, notamment sur les terrains de football. « Dieunor était très fort ! Il devait partir au Stade Rennais mais mon père a refusé car il ne travaillait pas bien à l’école… » Poussé et guidé, Jean-Ricner savait ce qu’il voulait faire de sa vie. « Ça m’a donné de la force pour jouer au foot tous les jours. » C’était sans compter sur le soutien de ses parents. « Même si je n’étais pas très bon à l’école, contrairement à mon frère – comme j’étais le chouchou -, mon père et ma mère m’ont autorisé à suivre ma passion. Je voulais vraiment percer ! »
Comme tous les footballeurs, passionnés ou professionnels, jeunes ou expérimentés, Jean-Ricner avait une idole. « Depuis tout petit, le joueur qui m’a le plus inspiré était Ronaldinho. Il est très élégant, très technique. Il est trop fort ! Je regardais souvent ses matchs. J’aimais bien tous les joueurs brésiliens en général. Leur technique est au-dessus. »

A l’âge de 10 ans, le football est devenu un réel objectif. Aidé par son premier coach à Villetaneuse Steeve Koulekpato, Jean-Ricner a appris le goût du travail et a progressé : « Il était gentil, marrant et cool. Il savait aussi être sévère quand il fallait bosser. Il ne me lâchait pas. C’était un bon coach ! » Et comme on dit, le travail paye. Repéré lors d’un tournoi, Jean-Ricner a signé au Mans pour une toute nouvelle étape de sa jeune vie de footballeur. Au début, il était ravi de rejoindre un centre de formation. Mais plus le temps passait, plus l’adolescent se sentait loin de chez lui. « Je me suis ressaisi très vite. Surtout grâce à Dieunor. J’avais la chance de vivre mon rêve, et en même temps lui vivait le sien à travers moi. Ça m’a donné de la force et j’y suis allé à fond ! »

Comme une seconde famille

Après une saison au Mans, Jean-Ricner est arrivé à La Gaillette. A 16 ans, il allait découvrir un autre environnement mais aussi trouver une seconde famille. « Quand je regarde en arrière, ça paraît tellement loin. J’en ai vécu des choses ici ! Que ce soit sur le terrain ou au centre… » Sans trop vouloir en dévoiler, Jean-Ricner lâche quand même une anecdote. « En communauté, ça parle beaucoup. Il y a des petites histoires, on déforme la réalité… Un jour, on avait fait une soirée “Vérité“ avec la fine équipe Jean-Kévin Duverne, Djibril Diani, Jeff-Reine Adélaïde, Yassine Fortune, Rayane Adim… C’était marrant. Certains ont pleuré parce qu’ils auraient voulu ne pas entendre certaines choses. Aujourd’hui, tout le monde se rappelle de cette soirée. On en rigole à chaque fois que l’on en reparle ! »

Quand on parle du RC Lens à Jean-Ricner, il ne peut pas faire sans évoquer son ami de toujours Jean-Kévin Duverne. « Je connais JK depuis tout petit. Il habitait à Epinay-sur-Seine, pas très loin de Villetaneuse. On a déjà joué l’un contre l’autre. Je l’ai même vu évoluer au poste d’attaquant ! » Plusieurs années après, les deux compères portent le même maillot avec les pros. Un joli clin d’œil à ceux qui veulent percer ou qui les ont connus depuis leur plus jeune âge. « Quand je reviens à Villetaneuse, le regard des gens a changé. Ils se posent beaucoup de questions sur la vie au centre, comment c’est d’être joueur professionnel. Les petits de la ville me prennent comme exemple et ça fait plaisir ! Forcément on doit faire attention à ce que l’on fait, à ce que l’on dit. Quand tu es footballeur, beaucoup veulent faire pareil que toi. Il faut avoir le meilleur comportement possible pour les plus jeunes, pour qu’ils suivent aussi le bon chemin. »

"Fashion acteur" ?

Il est vrai que les enfants prennent souvent les footballeurs pour des exemples. Que ce soit sur le terrain en imitant les plus grands ou dans la vie en copiant… leur coupe de cheveux. Et les cheveux, pour Jean-Ricner, c’est important ! « Il faut être présentable ! J’aime bien faire des dessins, ça change. Je vois que les gens aiment donc je continue. » Avant d’ajouter sur le ton de l’humour : « Je peux peut-être lancer une mode ! »

A défaut de pouvoir éventuellement devenir une future égérie, Jean-Ricner espère aller loin dans le football : « C’est difficile d’imaginer où je serai dans quelques années. Mais pourquoi pas jouer la Coupe du Monde, la Ligue des Champions… Et si le foot devait s’arrêter pour moi demain, je ne sais pas ce que je ferais… Arbitre peut-être ! » ajoute-t-il sur le ton de la plaisanterie. A moins qu’il ne ressorte les vieux dossiers et se lance dans la comédie. « Quand j’avais 13-14 ans, j’ai joué dans une web-série avec mes potes. » Il se remémore en éclatant de rires : « Ça s’appelait “Dans mon ghetto“ ! On avait 13-14 ans. Ça parlait de ce qu’il se passait dans la cité. Chacun avait son rôle selon les épisodes, ça changeait à chaque fois. On en a fait une dizaine. C’était plutôt marrant ! » Mais pas la peine de chercher sur internet, tout a été supprimé.

Leïla Talbi - rclens.fr