Découvrez notre rubrique « Point Par Point » qui retrace la vie de nos joueurs. Ce mois-ci, c’est Yannick Gomis qui s’est prêté au jeu !
« Je suis né à Dakar et j’y ai vécu jusqu’à mes 23 ans avant de venir en France. Je suis issu d’une grande famille. Ma mère a deux autres fils. Du côté de mon père, j’ai trois frères et deux sœurs. On n’a pas tous grandi ensemble. Quand mes parents se sont séparés lorsque j’avais six ans, j’ai vécu chez mes grands-parents maternels. On vivait en communauté avec mes frères, mes tantes et mon oncle. A leur séparation, ma mère est partie au Cap Vert pour devenir coiffeuse. Mon père travaillait comme vigile à Dakar.
Au début, c’était dur. Je vivais avec mes parents et d’un coup ils se sont séparés. Mais je suis toujours resté en bons termes avec eux. Je n’ai jamais ressenti l’absence de mes parents car mes grands-parents m’ont apporté beaucoup d’amour. On ne roulait pas sur l’or mais je n’ai jamais manqué de rien. C’est grâce à eux que je connais la valeur du travail. Rien n’est acquis dans la vie et rien n’est donné. Il faut aller chercher ce que l’on veut. Il faut se dépasser, surtout dans le métier que je fais. C’est ce qui m’a permis d’aller de l’avant. Ils m’ont aussi inculqué le partage parce que l’on vivait en communauté, et le respect de son prochain. J’essaye de l’appliquer partout où je vais. Le respect doit être mutuel. »
« J’étais un petit garçon plutôt calme mais perturbateur en groupe. J’aimais taquiner mes camarades et même mes instituteurs. Je n’aimais pas trop aller à l’école. Puis en 2002, l’équipe nationale sénégalaise est allée en demi-finale de la Coupe d’Afrique des Nations, puis a gagné contre la France en Coupe du Monde. C’était historique ! A cette époque, j’avais 10 ans et c’est là que je me suis dit « Je veux être footballeur professionnel » ! Je voulais faire ce que j’aimais et bien gagner ma vie pour aider ma famille.
A partir de ce moment-là, ce qui m’importait, c’était le football ! Après l’école, je rentrais vite à la maison. Mes grands-parents vérifiaient mes devoirs, je prenais mon goûter et j’allais jouer au foot.
Chaque été, il y avait des matchs de quartiers. J’étais bon, je marquais des buts. A chaque fois que je rentrais sur le terrain, j’avais le plaisir de montrer ce que je valais, que je savais jouer au football, que j’étais le meilleur. C’est comme ça que je me suis fait un nom à Dakar et c’est comme ça que j’ai intégré l’équipe première du quartier. Mon entraîneur, Cheick Sarr, a cru en moi. Si je suis footballeur professionnel aujourd’hui, c’est grâce à lui, et aussi à Malick Ba, international sénégalais qui a joué à Nantes et au FC Bâle. Ces deux personnes m’ont poussé et m’ont conseillé d’arrêter l’école au Sénégal pour pouvoir percer et exercer cette passion. Je n’ai pas lâché et à 19 ans, j’ai joué à l’Olympique Ngor en deuxième division puis en première. Trois ans plus tard, je suis arrivé en France. »
« J’ai fait un premier essai concluant à Evian mais les dirigeants n’étaient pas en accord avec le coach. Deux ans plus tard, c’était à Fréjus mais l’entraîneur trouvait que je n’avais même pas le niveau de National. Un an après, alors que je jouais la Coupe de la Confédération Africaine de Football, l’équivalent de l’Europa League, le président d’Orléans qui était en vacances au Sénégal m’a repéré. J’ai fait des essais et j’ai commencé à jouer avec la réserve. La suite, on la connait…
J’appréhendais un peu de venir en France. Nouvelle culture, nouvel environnement. J’étais seul et c’est la première fois que je partais aussi longtemps et aussi loin de ma famille. Je me suis bien intégré mais l’adaptation était difficile au niveau du jeu qui était beaucoup plus élevé. Grâce aux valeurs que mes grands-parents m’ont inculquées, j’ai eu la force de continuer et de m’adapter, malgré mes doutes et le fait que j’ai signé très tard professionnel [Ndlr, à 23 ans]. »
« Je n’oublie pas d’où je viens. Quand j’étais au Sénégal, je ne gagnais pas bien ma vie. Mais je m’en contentais. Même si j’ai toujours cherché à aller plus haut. Je suis très croyant et j’ai beaucoup prié pour réussir. Je savais que mon travail allait payer. C’est une très bonne récompense ! Mes parents m’appellent souvent et me disent qu’ils sont fiers de moi. Ils m’ont toujours soutenu. Mes grands-parents ne sont plus là. C’est triste. J’aurais aimé qu’ils soient encore en vie pour profiter de ma réussite. Mais dès que je peux faire plaisir à mes parents et à ma famille, je n’hésite pas. »
Avec l'équipe locale
« Je suis quelqu’un de posé et de très calme. Je suis un peu susceptible mais je ne le montre pas. J’arrive à prendre sur moi et à faire abstraction de beaucoup de choses. Dans mon métier, il y a beaucoup de provocations et dans l’énervement, on n’arrive à rien faire. Quand je suis hors de moi, je peux être malpoli. Ça m’a déjà joué des tours sur le terrain mais ça n’est jamais allé bien loin. Je fais partie des attaquants qui n’ont jamais reçu de carton jaune, si ce n’est une fois pour simulation.
Je ne suis pas méchant. Je suis très généreux. On me reproche souvent d’être trop altruiste sur un terrain mais je suis comme ça. C’est dans ma nature.
J’essaye de me recentrer sur moi-même quand je peux. Les moments de recueillement me font du bien. Ils n’appartiennent qu’à moi. Toutes mes prières sont entendues. Quand je vois où je suis aujourd’hui, c’est parce qu’il y a quelqu’un là-haut. »
« J’ai rencontré ma femme Marie-Ange au Sénégal lorsque j’étais jeune. Elle m’a ensuite rejoint en France. On a une petite fille, Maya, qui a 2 ans. Depuis qu’elle est née, beaucoup de choses positives sont arrivées. J’ai été plus performant avec Orléans. J’ai enchaîné les matchs, les buts. Mes équipiers me faisaient confiance. Maya est la plus belle chose qui m’est arrivée dans la vie. C’est une force, une motivation supplémentaire. Je suis un vrai papa poule ! Ma fille peut faire tout ce qu’elle veut de moi ! Quand sa maman dit non pour quelque chose, elle sait qu’elle peut venir me voir… Je dis oui à tout, et ça, ça énerve ma femme [Ndlr, rires]. Je lui consacre tout mon temps. Parfois, j’essaye d’être autoritaire mais je sais que ça ne va pas durer. »
« Je regarde parfois des matchs de foot à la télévision. Mais la plupart du temps, je joue à la console, aux jeux de société et aux mots fléchés. Ça me permet de développer ma culture générale. A Orléans, mon ancien équipier Karim Ziani me disait souvent que je jouais aux mots fléchés pour avoir mes papiers français [Ndlr, rires]. »
« Personnellement, j’aimerais avoir d’autres enfants. D’un point de vue professionnel, j’espère aller le plus loin possible avec le Racing, rejouer en Ligue 1 et marquer l’histoire du club. »